mercredi 25 juin 2014

Under the Skin - Jonathan Glazer



Réalisé par Jonathan Glazer
Écrit par Jonathan Glazer et Walter Campbell
D'après le roman de Michel Faber
Avec : Scarlett Johansson, Jeremy McWilliams...
1h47
Sortie : 25 juin 2014

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Her skin


De Birth (2004) à Under the Skin (2014) s’est creusé un immense fossé temporel et esthétique dans la petite filmographie de Jonathan Glazer. Ancien réalisateur de clip publicitaires, le cinéaste américain enclenche une manœuvre radicale avec ce film de science fiction aux antipodes du classicisme élégant de Birth. En plus d’afficher une modernité transcendante dans sa mise en scène et son travail sonore, Glazer digresse vers de nouveaux terrains thématiques et sensoriels, menant le film vers l’expérience pure qui laissera bon nombre de ses spectateurs grand public - comme cinéphiles - à l'entrée du manège.   

Les histoires d’extra-terrestres ne se comptent plus de nos jours. Celle avec une Scarlette Johansson enveloppé d’une carapace vampirique se démarque sans conteste. Dès les premiers plans, nous ne faisons qu’un avec cette plantureuse jeune femme venue d’ailleurs, à l’apparence trompeuse et aux paroles attirantes provenant d’un véritable gouffre de sensualité (cf Her de Spike Jonze pour en avoir la preuve inaltérable). Under the Skin tend à créer une atmosphère propice à l’immersion maladive de son spectateur humain. Bande son hypnotique, cadrages subjectifs, Glazer nous glisse dans la peau de Laura. Les trente premières minutes consiste en une chasse à l’homme pour le faire disparaître dans un espace indéfini et infini (faisant grossièrement écho au 2001 de Kubrick) par des séquences abstraites et semi expérimentales nous noyant littéralement dans l’antre intime de Laura (sorte de strip tease en sous vêtements noirs sur fond noir). La répétition calculée de plusieurs de ces captures, si elles captivent les premières minutes, affichent par la suite une lourdeur non assumée venant abolir tout intérêt principal et puissant propos de l’histoire, rendant l’expérience tant attendue subitement ennuyeuse et vide de sens.

La deuxième partie du voyage de Laura ne renouvelle malheureusement pas le spectacle. La stupidité de l’avancement de l’intrigue en devient ridicule (un extra terrestre qui essaye de s’adapter à l’espèce humaine... sans surprises, déjà vu bien souvent) et poussif tant la lenteur accumulée des plans et des actions filmées n’accrochent plus le regard, n’intéressent plus, allant jusqu’à l’attente d’une fin ouverte et puissante (ce qui n’est malheureusement pas le cas). Si Under the Skin sort des sentiers balisés, c’est finalement pour se perdre dans des environnement que l’on connaît déjà, incitant à l’exploration mais où Glazer choisit d’opter pour le film de science fiction minimaliste à simples effets spéciaux, faussement réflexif et intensément prétentieux. Laura, avant de se faire avoir, semblait s'être prise – comme nous - de la poudre aux yeux.

Jeremy S.

Laura (Scarlett Johansson)

vendredi 13 juin 2014

Black Coal, Thin Ice - Diao Yinan



Écrit et réalisé par Diao Yinan
Ours d'or - Berlinale 2014
Ours d'argent du meilleur acteur
Avec : Fan Liao, Lun-mei Gwei, Ailei Yu...
1h46
Sortie : 11 juin 2014

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Soleil noir

A touch of sin de Jia Zhang-ke (2013) semble servir régulièrement de tremplin d’approche pour le nouveau film chinois du jeune Diao Yinan dans la recherche de similitudes entre les deux oeuvres. Le tableau de la Chine contemporaine que dépeint le cinéaste n’est effectivement pas si éloigné de celui de Jia Zhang-ke. Mais le médium de la critique et le genre dans lequel s’inscrit Black Coal s’en détachent formellement, arborant à la fois ses grandes forces comme ses petites faiblesses.

La volonté de Diao Yinan est d’abord celle de réaliser un pur film noir, respectant les codes du genre en cherchant à les détourner légèrement. Comme dans Le Faucon maltais de John Huston, il ne faudra donc pas s’attendre à une limpidité parfaite dans la résolution de l’enquête, ou une piste toute tracée avec un guide lors de la recherche d’indices et d’interrogatoires de suspects. La grande zone d’ombre de Black Coal, ce sont d’abord ces six années qui séparent la mort du meurtrier présumé de la découverte de nouveaux cadavres similaires. L’inspecteur Zhang, dans un climat hivernal et des paysages urbains comme ruraux littéralement paralysés, va tenter de percer le mystère d’abord sans conviction, jusqu’à sa rencontre avec l’employée de la teinturerie. Femme antipathique et moralement atteinte, cette dernière va repousser le trop curieux Zhang, ne laissant donc planer à priori aucune ambigüité sur son rôle dans cette affaire. Nous découvrons bien trop prématurément que ce personnage y est intrinsèquement lié, et l’attente de la résolution de l’enquête se fait plus ennuyeuse qu’haletante. À posteriori, aucune prise de recul ne s’opère, nous faisant observer indifféremment ces personnages qui lèvent leurs masques pour s’affirmer dans leur vraie nature.


Zhang (Fan Liao)
Il faut néanmoins signaler les folles ambitions esthétiques du film rendant les deux environnements (urbain et rural) immersifs et inquiétants. La peur, le dégoût d’actes ultra violents surgissent comme du sang sur un mouchoir blanc, prenant aux tripes un spectateur captivé ou sceptique devant l’avancée de l’intrigue. La violence est donc le seul point commun avec le film de Jia Zhang-ke, même si sa mostration est parfois d'un tout autre calibre. Il manque à Black Coal une mise en scène plus percutante, plus inspirée dans la composition des plans et de ses cadrages statiques. Ces défauts parviennent cependant à être rattrapés par de grands instants lyriques et absurdes inattendus survenant tardivement.

Cette longue scène dans une nacelle de grande roue où le policier et l’employée s’affrontent du regard pourrait à elle seule démontrer la principale puissance de l’œuvre : construite sur l’attente et la recherche d’indices dans le comportement de ses personnages, ces quelques plans nous happent par leur changements de luminosité et de colorimétrie (directement inspirés du cinéma de Wong Kar-wai ou d'Hou Hsiao Hsien), venant troubler un ordre du film noir classique. Et c’est lorsque Zhang, en apparence normal et n’ayant rien à cacher, viole sauvagement ce personnage féminin qui y prend du plaisir, que Diao Yinan justifie pleinement le caractère moderne inaltérable de son enquête policière. Tout comme ces feux d’artifices instaurant la joie et la bonne humeur sur ce monde enlisé dans un charbon noirâtre, figé dans une glace qui ne semble pas prête de fondre.

Jeremy S. 

Zhang (Fan Liao) et l'employée de la teinturerie (Lun-mei Gwei)

mardi 10 juin 2014

The Rover - David Michôd



Écrit et réalisé par David Michôd
Festival de Cannes 2014 - Hors Compétition
Avec : Guy Pearce, Robert Pattinson...
1h42
Sortie : 4 juin 2014

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Mad Guy

« Dix ans après la chute » sont les premiers mots posés par David Michôd pour nous situer vaguement un cadre temporel futuriste. Dans le bush australien aux allures post-apocalyptiques, un homme se fait voler sa voiture. Cet homme, qui nous est inconnu, apparaît dès les premiers instants comme bouillonnant de rage, meurtri, tout sauf comme le héros stéréotypé du western auquel nous pourrions précocement l’apparenter.

Avec ce scénario poids plume, c’est à une revisite du film de genre que s’attaque Michôd. Faisant ouvertement référence au Mad Max de Georges Miller (1979), The Rover acquiert progressivement une puissance phénoménale en partie grâce à son endurance et à son rythme, tour à tour lent, rapide, latent, et sa mise en scène aussi froide et maîtrisée que le No country for old men des frères Coen, autre film à l’esthétique proche. The Rover n’est donc pas un road movie cinématographiquement novateur, mais parvient à déranger autrement que par son atmosphère sombre et morbide.
Car Michôd continue habilement sur sa lancée et son propos qui faisait déjà la grande force d’Animal Kingdom (2010). Ses personnages, caractérisés crûment comme des animaux, passionnent avec une cohabitation hallucinante de sentiments d’empathie et d'antipathie. Le bush futuriste n’est fait que d’hommes violents et cruels, de rois lions régnant hautement sur la savane désertée de toute présence féminine (les rares actrices du film ne possèdent d’ailleurs aucune once de féminité). Ainsi, Eric (Guy Pearce) à l’inverse de son compagnon de route Rey (Robert Pattinson, dans un rôle sidérant) domine gravement la situation. En prenant insconsiemment Rey sous son aile, il transmet le virus dont il est atteint. « Que lui avez-vous fait ? » lui demande le frère de Rey lors de la rencontre finale.

Eric (Guy Pearce) et Rey (Robert Pattinson)

Les questions, à l’intérieur du film, ne trouvent pas systématiquement leurs réponses, au sens propre comme figuré. Le silence est précisément le facteur premier de l’éclatement d’une violence à la manière du magma sortant d’une chambre magmatique. Quand Eric tire sans préméditation dans la tête d’un nain, c’est d’abord dans un objectif purement pratique. Dans un deuxième sens, son action délibérée paraît vide de sens. The Rover pourrait crouler et s’alourdir considérablement si une théorie fortement nihiliste sous tendait l’aventure d’Eric et de Rey. Bien heureusement, Michôd suit un discours clair et parfois même, on pourra lui reprocher, trop simpliste. L’homme est un animal et ne peut être qu’amené à régresser pour se transformer en bête sanguinolente. Propos violent et peut être dans l’outrance, mais qui trouve tout son sens dans cet environnement futuriste décapé de toute couleur, de tout sourire éclatant.

Nous ne sommes cependant pas toujours à l'abri de longueurs inévitables. Dans ses « pauses » incontournables et ses dialogues philosophiques porteur de sens, Michôd tend à s’éloigner de la radicalité de son propos en s’essayant à des réflexions peu passionnantes qui auraient aisément pu nous être épargnées. The Rover n’en demeure pas moins une expérience assoiffante à la réalisation impeccable. À l’image d’une de ses premières séquences, nous suivons à petit pas, dans de brutales accélérations et décélérations, la course d’Eric à la recherche de son bien, la seule chose qui puisse encore compter pour lui dans ce purgatoire à la chaleur étouffante. Sa berline, et rien d’autre.  

Jeremy S.

Eric (Guy Pearce) et Rey (Robert Pattinson)

dimanche 8 juin 2014

Edge of Tomorrow - Doug Liman



Réalisé par Doug Liman
Écrit par Christopher McQuarrie, Jez et John-Henry Butterworth...
Avec : Tom Cruise, Emily Blunt...
1h53
Sortie : 4 juin 2014

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Die easy

Oblivion (Joseph Kosinski) et Jack Reacher (Christopher McQuarrie) semblaient rediriger Tom Cruise dans le droit de chemin d’une belle suite de carrière, par des rôles intéressants, cohérents et puissamment incarnés. En 2014, l’illusion paraît s’évaporer. Edge of Tomorrow, dernier né du talentueux Doug Liman (connu essentiellement pour La mémoire dans la peau), semble vouloir combiner grossièrement jeux vidéo, film d’action et de science fiction dans un pot pourri volontairement mainstream (faisant ouvertement référence à Un jour sans fin de Harold Ramis entre autres). Tom Cruise doit mourir 300 fois pour sauver le monde envahit par des extra-terrestres à l’intelligence suprême. Cette histoire éminemment nullissime n’est pas le seul handicap de ce blockbuster. L’esthétique soit disant embellie par une 3D à 200% inutile ne renouvelle aucunement le genre sur-exploité ces quinze dernières années. Si la présence de la rayonnante Emily Blunt empêche le naufrage total, c’est avec agacement et mal de crâne que l’on sortira de ces deux heures de guerre insupportables, ininventives au possible et au dénouement plus que mystérieux. Signé Doug Liman, un nouveau « Marc Lévy du blockbuster américain ». 

Jeremy S.


Rita Vrataski (Emily Blunt) et William Cage (Tom Cruise)

jeudi 5 juin 2014

Bird People - Pascale Ferran



Réalisé par Pascale Ferran
Écrit par Pascale Ferran et Guillaume Breaud
Avec : Josh Charles, Anaïs Demoustier...
Festival de Cannes 2014 - Un Certain Regard
2h08
Sortie : 6 avril 2014

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Free Birds


Il n’est pas nécessaire de remonter bien loin dans cette première partie de l’année pour y retrouver une œuvre tout aussi subtile, émouvante et anticonventionnelle que ce Bird People. Aimer, boire et chanter d’Alain Resnais serait l’autre film caractérisant le mieux cette tendance particulière du cinéma français en ce début de siècle. À la différence près que nous avons ici affaire à une cinéaste quinquagénaire, à la filmographie peu fournie mais riche en surprises et grands films maîtrisés, qui ont construit sa réputation comme l’une des plus grandes réalisatrices de sa génération. Bird People ne peut se classer dans une catégorie bien précise du cinéma français. Jouant sur plusieurs registres, plusieurs genres, le film évite en permanence de se ranger aux côtés de la comédie populaire, du drame naturaliste, ou même de l’œuvre post nouvelle vague. Un objet hybride en somme, qui ne cesse d’étonner avec son rythme à la fois véloce et soutenu sur plus de deux heures, dans un même lieu auquel nous n’avons d’autre choix que de nous y adapter in medias res.

Scindé en deux parties, Bird People nous conte le destin de deux personnages n’ayant à priori aucun point en commun excepté celui de rejeter leur vie quotidienne monotone et routinière. Les premiers plans du film dévoilent discrètement l’approche de Pascale Ferran pour ses deux protagonistes. Nous faisant partager des monologues intérieurs de la population du RER, les musiques écoutées secrètement par des casques audios, c’est à une certaine perversion, entrée dans l’intime que nous invite la cinéaste. Gary est un ingénieur informatique américain parcourant le monde dans les avions pour se rendre à multitudes de réunions. Du jour au lendemain, cet homme décide de tout abandonner, de tirer un trait aussi bien sur sa vie professionnelle que familiale. Mais connaissons nous véritablement Gary ? Cette ambigüité et ce doute sur les sentiments intériorisés de l’humain est ce qui fait la principale force du cinéma de Pascale Ferran. Lorsque Gary observe un accident de la route à l’arrière d’un taxi, rien n’est plus mystérieux et enfoui que les torrents de pensées qui affluent dans son cerveau malade, menant à diverses hypothèses sur la signification de ces carcasses. La communication est un problème au coeur du film, non seulement entre le spectateur et le protagoniste (que l'on observe comme une victime allant à sa perte), mais aussi entre les personnages du récit. Un des micros climax de la première partie se déroule dans la confrontation entre Gary et sa femme (une dispute conjugale de haute envergure) à travers l’écran d’ordinateur portable. Dans ce faux champ contre champ, ce n’est pas seulement un malaise qui s’installe, mais aussi un questionnement fondamental sur les raisons de Gary, cette instance transcendante qui le pousse à fuir sa vie, sortir des rails et s’envoler mentalement comme physiquement vers d’autres contrées terrestres ou imaginaires.

Gary Newman (Josh Charles)

À cette première partie concrète - et déjouant un piège du naturalisme - s’accole une deuxième partie aux antipodes, d’un lyrisme et d’une abstraction folle. C’est l’histoire d’une jeune femme de chambre, Audrey, magistralement interprétée par la fondante Anaïs Demoustier. À plusieurs reprises, elle et Gary manquent de se croiser. Vont-ils finalement se rencontrer ? Ce n’est pas la question que veut nous faire poser Pascale Ferran. La question est d’ordre beaucoup plus complexe et imaginaire : que se passerait-il si la liberté était offerte d’un seul coup, d’une seconde à l’autre pour Audrey ? Jeune femme manquant encore de recul, Audrey n’évolue clairement pas, à l’inverse de Gary, sur une pensée hédoniste visant à vivre sa vie pour son propre plaisir, son bien être et non uniquement celui des autres. En se transformant en moineau, le regard d’Audrey sur le microcosme de l’aéroport Charles de Gaulle va radicalement changer et se métamorphoser en observation quasi divine de la vie courante. Sur le plan formel, Bird People atteint ici des sommets. Les plans fixes au sol laissent place à une caméra portée dans le ciel et en plongée, où sa prise de liberté figure elle aussi celle d’Audrey. L’irruption du fantastique au milieu de cette histoire tout ce qu’il y a de plus « terre à terre » est aussi synonyme d’affranchissement des façades qui nous emprisonnent au cœur de cet urbanisme étouffant. Ferran repousse ses limites et laisse libre cours à son écriture, que l’on pourrait presque qualifier par moments d’« automatique ». Comme dans Lady Chatterley (2006) le temps filmique ne cherche pas à se substituer au temps réel tout en établissant une cohérence narrative soulignée par ces nombreux fondus au noir, ne nous annonçant jamais à l’avance la fin ou le début d’une autre séquence, d’autres actions. Bird People, dans sa forme, est aussi imprévisible que passionnant et parfois drôle à suivre, comme en témoignent les voix offs (du personnage ou parfois d’une voix inconnue, rappelant à l’évidence le cinéma d’Alain Resnais) surgissant inopinément dans cet univers réaliste sublimé.

Audrey Camuzet (Anaïs Demoustier)

Lorsqu’Audrey incarnée en moineau se rend dans la chambre d’Akira, nous assistons à un échange des plus renversant du film. Si la communication semble morte à tout jamais, et que les êtres humains ne se regardent plus en face en ne s’adressant la parole qu'à travers les nouvelles technologies, il subsiste encore les artistes comme Akira qui eux, cherchant à comprendre autrement leur monde environnant, acceptent de communiquer avec toute forme vivante. En dessinant Audrey « version moineau », Akira extrait le naturel en même temps qu’une part de fantastique du monde contemporain. L’analogie entre les avions de l’aéroport et les oiseaux du ciel n’est pas sans nous rappeler les digressions poétiques d’Apichatpong Weerasethakul, cependant dans un tout autre registre. Les oiseaux, en plus de se retrouver dans les avions, se retrouvent finalement aussi dans l’être humain. Il n’est pas anodin de constater que le costume de femme de chambre d’Audrey évoque discrètement les couleurs du plumage d’une pie. Le plan cristallisant le mieux ces reconnaissances serait donc celui du tapis roulant dans l’aéroport Charles de Gaulle : dans ces quelques secondes où Gary, sous forme humaine, croise Audrey dans son corps de moineau. Les deux êtres se regardent, Gary sourit, et semble déjà familier avec ce petit oiseau croisant son chemin. Après être resté enfermé dans sa chambre pendant plusieurs heures les yeux rivés sur son ordinateur et son téléphone portable, Gary respire littéralement à la vision de ce moineau humanisé. Il est lui aussi un bird people, un oiseau prêt à s’envoler et non à suivre des miettes de pain sur un chemin tout tracé comme le petit poucet. C’est cela que raconte l’un des plus grands films de Pascale Ferran : obtenir sa liberté en faisant du mal aux autres n’est pas une question d’éthique ni de morale, mais bien de la simple recherche d’un plaisir vital pour l’homme : celui de se dévergonder d’un monde contemporain peu ouvert sur le monde extérieur. Audrey et Gary sont des fugitifs, en aller simple sur la voie du bonheur, suivant un trajet toujours plus agréable à deux.  

Jeremy S.