Réalisé par Stephen Frears
Écrit par Jeff Pope et Steve Coogan
D'après le roman de Martin Sixsmith
Avec : Steve Coogan, Judi Dench...
1h38
Sortie : 8 janvier 2014
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Vacances américaines
Grands cinéastes britanniques, avouons-le, existent en petit nombre de nos jours. Stephen Frears, a plus de soixante dix ans, ne semble aucunement
intéressé par la retraite. Philomena
témoigne-t-il pour autant du énième film de vieux monsieur à court d’idées ? La partielle réussite de ce dernier film se situe clairement à ce niveau,
tant cette adaptation prend un aspect fin et subtil dans sa mise en scène disséquant
habilement le roman du journaliste Martin Sixsmith, pour lui donner une
nouvelle et alternative portée tragi-comique, surfant par ailleurs sur un sujet
des plus durs qui aurait été traité de manière proprement académique chez
d’autres cinéastes.
C’est un voyage que nous raconte Stephen Frears pendant 90
minutes : celui de Martin Sixsmith et Philomena Lee, partant à la
recherche d’un fils volé et perdu. Scénario ressemblant à un téléfilm ?
C’est ce que l’on pourrait penser lors de cette exposition plate et fade, ne
magnifiant qu’à moitié l’Irlande contemporaine. Ce n’est certes pas le sujet du
film, mais l’environnement de Stephen Frears a toujours semblé ludique,
personnel et surtout familial (Tamara Drewe brillait justement par le physique
de Gemma Aterton, tel une tâche éclatante surexposée dans le petit village
anglais morne et terne) nous justifiant une démarche d’enquêteur et
d’explorateur des mœurs de la vie quotidienne britannique. Les flashbacks de la
vie passée de Philomena ne donnent ainsi aucun éclaircissement particulier à
l’histoire racontée, et aurait aisément pu être coupés au montage bien qu’ils n’apportent finalement aucune lourdeur déstabilisante.
Philomena Lee (Judi Dench) et Martin Sixsmith (Steve Coogan) |
Le film démarre donc véritablement au départ de Philomena et
Martin pour le continent américain. Les deux personnages apprennent vite à se
connaître, plaisantent, discutent de leurs vies, ne laissant aucunement deviner
le spectre noir planant autour d’eux qu’ils découvriront peu après leur
arrivée : la mort d’Anthony. Le coup malicieux de Stephen Frears intervient
à ce moment précis, abolissant ainsi la contrainte de l'adaptation d’« histoire vraie »
et faisant surgir le style de l’auteur : l’humeur comique et plaisante de
la première partie ne retombera pas suite à ce nœud dramatique. Chez Stephen
Frears, il ne suffit que d’un plan sur Philomena pleurant dans les bras de
Martin pour montrer le regret et la tristesse. Inévitablement, ce plan crée une
distanciation insoupçonnable entre nous et Philomena, allant à l’encontre d’un
naturalisme ambiant que l’on pourrait trouver chez d’autres cinéastes
européens.
L’élégance de la mise en scène de Frears y est aussi la
principale responsable. Cadrages calculés, utilisation majeure du grand angle,
elle rend compte non seulement d’une accessibilité pour le tout public mais
également d’une douceur légère, intime, qui parsème le voyage de Martin et
Philomena. Ce dernier point se conjugue parfaitement avec l’interprétation de
Steve Coogan, ayant une forte et sensible présence à l’écran. Judi Dench, il
n’est pas besoin de le rappeler, demeure une excellente actrice jamais dans l'excès et ne faisant pas
toujours son âge : le langage et les dialogues écrits par le scénariste
(Steve Coogan également) impulsent une jeunesse d’une fraicheur absolue sous
ces visages ridés et grisonnants.
Qui a dit que Philomena visait uniquement les sexagénaires ? C’est en
évitant cet unique public cible que Stephen Frears met en images une triste
histoire haute en couleurs, restant par ailleurs faiblarde dans sa
première partie paresseuse peinant à rendre les deux acolytes attachants et
familiers.
Jeremy S.
Philomena Lee (Judi Dench) et Martin Sixsmith (Steve Coogan) |
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