Ecrit et réalisé par Kim Ki-duk
Avec : Lee Jung-Jin, Min-soo Jo, Ki-Hong Woo
1h44
Sortie : 10 avril 2013
-
Michel Ange oublié
2013 restera une année de gloire pour Kim Ki-duk. Pietà, son
dix-huitième long métrage, a remporté en ce début d'année la récompense suprême de la Mostra de
Venise, le lion d’or. Attribué au Faust d’Alexandre Sokurov l’an dernier (œuvre
d’une rarissime beauté), le nouveau film de Kim Ki-duk intrigue grandement pour
une récompense de cette envergure, et trouble une grande démarche artistique attendue.
Synopsis : Abandonné à sa naissance, Kang-do est un
homme seul qui n’a ni famille, ni ami. Recouvreur de dettes sans pitié et sans
compassion, il menace ou mutile les personnes endettées dans un quartier
destiné à être rasé. Un jour, Kang-do reçoit la visite d’une femme qu’il ne
connaît pas et qui lui dit être sa mère. Pour la première fois de sa vie, le
doute s’installe en lui…
Si Pietà devait nous laisser des séquelles après la projection,
quelles seraient-elles ? Le problème est bien là. Que dire, que retenir de
cette histoire aux allures de déjà vu, étirée sur 1h44, avec un sujet traitable
en 20 minutes ? La trame scénaristique, en plus d’être d’une simplicité
agaçante, ne participe jamais au décollage du film, en proposant des conflits plus ou
moins attendus. Peu de surprises pour un cinéaste sud-coréen, dont les
confrères parviennent davantage (Hong Sang-soo, Park Chan Wook, Kim Je-woon) à
remuer leur public, à transmettre leur atmosphère. Car c’est ce qu’est
Pietà : ni plus ni moins qu’un film d’atmosphère paresseux, avec un climax
quasi inexistant, nous étouffant par des scénettes construites sur un faux
suspense (ce qui en soit pourrait être une bonne chose).
Kang Do est un « être pas comme les autres », en
marge de la société contemporaine. L’arrivée d’une femme prétendant être sa
mère va bouleverser son mode de vie, et changer radicalement son caractère.
Kang Do est un personnage similaire à ceux de Park Chan Wook ou Bong Joon-ho,
mais le sérieux avec lequel est traité son aventure manque cruellement d’esthétisation
et surtout d’interêt. Filmer au plus près des corps n’apporte rien, tout comme
une caméra portée utilisée faiblement. La mise en scène vaine de Kim Ki-duk, sans être académique,
ne progresse jamais tout au long du film et en vient même à s’auto caricaturer.
Kangdo, brillament interprété par Lee Jung-Jin, porte le film sur ses épaules. Un jeune homme sec, violent, provocateur, provoquant. Ce rôle lui convient comme un gant et rend la majeure partie du film crédible. Car de crédibilité, il n'en faut pas qu'une simple esquisse pour une histoire de cette envergure, qui au final délaisse le côté poétique/religieux de la chose. Si l'affiche est une représentation de la sculpture de Michel Ange (La Pietà, 1498), le film de Kim Ki-duk est à l'opposé, tout en restant dans la métaphore de la sculpture. La beauté de Pietà réside peut être dans ce sens caché, restant assez naïf au final et peu convaincant. Nous ne sommes pas dans un tableau représentatif de la statue de Michel Ange, comme nous pouvions l'espérer. Et forcément, on s'ennuie, jusqu'à un dénouement plutôt prévisible. Kim Ki-duk vole le lion d'or à Paul Thomas Anderson ou encore Harmony Korine. Les sud-coréens demeure néanmoins comme d'importants cinéastes virtuoses. Presque tous.
Jeremy S.
La mère (Jo Min-soo) et Kang Do (Lee Jung-Jin) |
La mère (Jo Min-soo) |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire