mercredi 19 mars 2014

Wrong Cops - Quentin Dupieux



Écrit et réalisé par Quentin Dupieux
Avec : Mark Burnham, Eric Judor, Eric Wareheim, Marilyn Manson...
1h23
Sortie : 19 mars 2014

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Wrong way


En moins d’une décennie, Quentin Dupieux a su imposer son renouveau du cinéma comique français anti balisé, dynamitant des frontières déjà explorées pour mettre à nu un nouvel art hybride, résultant autant d’influences artistiques que de digressions métaphysiques : la comédie surréaliste, reposant sur du « non-sens », la « no reason » défendue par l’esprit dérangé du compositeur/cinéaste. Wrong Cops, contre toute attente, paraît moins déjanté et complexe que Rubber et Wrong. Se recentrant uniquement sur le territoire des flics, déjà critiqué et parodié sauvagement dans ses autres films, Dupieux parvient à rétablir une cohérence dans son univers filmique au charme foutraque et désordonné.

Le revers de la médaille se propage malheureusement dans l’immédiat. L’habile jeu sur le spectateur de Rubber ou les différents univers esthétiques mis en scène dans Wrong laissent place à une comédie vulgaire et potache de quatre vingt minutes, n’allant nulle part et ne disant rien. Un pur délire ? Nous n’en sommes jamais loin, même si l’importance primordiale de la musique et des caractères originaux des personnages propres à Dupieux maintiennent Wrong Cops dans la droite lignée d’un surréalisme sous entendu. Mais c’est en en montrant moins que Dupieux s’enferme dans une catégorie, s’auto balise inconsciemment. Wrong Cops repose effectivement en grande partie sur le dialogue, plus que sur une esthétique désopilante dans laquelle se fondait toute la force de son cinéma.

David Dolores Frank (Marilyn Manson) et Duke (Mark Burnham)

Rough (Eric Judor) le pirate musicien, Duke (Mark Burnham) le balèse insolent, ou encore Renato (Eric Wareheim) l’obsédé sexuel, sont des flics ripoux débiles vivant dans leur monde sans manifester le moindre attrait pour le monde normal des civils. Ce sont des animaux cloîtrés dans un zoo dont l’évasion demeure impossible, et où toute espérance de succès est suivie d’un échec spontané. Le montage véloce et l’enchaînement mécanique des scénettes du film participent à ce tourbillon en sur-place des actions de ces bêtes infâmes et vulgaires, n’étant là que pour crier ô combien la vie est source d’emmerdes. Le suicide de l’un des leurs justifie un climax attendu et décevant, demeurant cependant anti moralisateur. Nous ne perdons pas nos repères, et assistons passivement aux aventures (parfois lourdingues et manquant presque de « too much ») de Duke et Rough comme dans une comédie conventionnelle, certes sale et jouissive, mais perpétuellement en dessous de nos attentes pour une oeuvre signée Dupieux.

Plus que mineur, Wrong Cops apparaît comme un petit film indépendant anecdotique, traversé par une vision cruelle d’un artiste marginal en manque d’inspiration. Car si Dupieux est au cinéma français ce que le rap est à la musique, la qualité de ce dernier film n’est clairement pas évaluable. Les rumeurs circulant à propos de l’avenir de sa carrière convergent cependant vers de bonnes nouvelles, justifiant Wrong Cops comme un bouche trou pour combler l'attente d'un grand film. Finalement inutile et ne servant qu’à rabaisser le talent prometteur du cinéaste. « Show me your breasts ! » devrait alors se substituer par un « Show us that you still have balls, man ! », canon pointé sur la tête de Mr Oizo.

Jeremy S.

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