samedi 5 octobre 2013

Blue Jasmine - Woody Allen



Ecrit et réalisé par Woody Allen
Avec : Cate Blanchett, Alec Baldwin, Sally Hawkins...
1h38
Sortie : 25 septembre 2013

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Portrait de femme


To Rome With Love, comédie peu inventive et terriblement régressive, avait déçu plus d'un adepte du cinéaste américain l'année passée. Blue Jasmine, dès le premier quart d'heure, indique clairement que le maître ne reprendra cette fois pas les chemins de la comédie pure (To Rome With Love, Whatever Works, Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu ...) ni ceux du film noir (Le rêve de Cassandre, Match Point...). Cette fois ci, Woody Allen s'inscrit dans la comédie dramatique, voire le drame psychologique, tout en laissant tranparaître sa marque de fabrique ainsi que son talent de scénariste, où l'on ne cessera d'être stupéfait par la dimension phénoménale de certaines petites grandes scènes. 

Jasmine (Cate Blanchett) vient d'arriver à San Francisco. Venant de New York où elle a quitté son mari (Alec Baldwin), c'est l'occasion pour elle de recommencer une nouvelle vie, en compagnie de sa soeur Ginger (Sally Hawkins). On pense alors déjà aux grands classiques américains où Woody Allen souhaite souvent se classer (générique constamment rétro) sans pour autant prétendre à une certaine modernité et novation dans sa manière de raconter un drame. Blue Jasmine est d'abord un film d'émotions, allant des ricanements aux chaudes larmes, brillament orchestré sans fausse note ni passages inutiles. 

Le flash back, élément central de Blue Jasmine ne surgit pas pour éclairer le présent, mais bien pour le briser, le contaminer, et non l'y confronter mécaniquement. Cate Blanchett (futur oscar, nous pouvons l'espérer) traverse ses deux vies radicalement différentes sans varier inutilement son jeu ni chercher à interpréter ce pourquoi le personnage est montré : dans un naturel hallucinant, Woody Allen dresse un portrait de femme jamais encore vu au cinéma de cette façon, versant dans un classicisme volontaire en évitant la lourdeur attendue de son scénario (confié à quelqu'un d'autre, le film aurait été d'une ennui considérable). Ainsi, à la découverte de la mort de son mari, la vision de Jasmine et de nous, spectateurs, va se voir modifiée quant aux événements qui nous seront présentés. L'alternance des flashbacks et des deux types d'émotions va alors converger vers un seul et même point : la mélancolie, la sagesse, le regret. Nous prendrons alors conscience de la noirceur cachée et de la couleur bleue du titre, synonyme de tristesse, plus encore que de nostalgie. 
Les adjuvants de Jasmine demeurent quant à eux le bémol de ce magnifique conte. Cate Blanchett concentrant toute l'attention, Peter Sarsgaard et Sally Hawkins peinent à lui faire face. Quelquefois, c'est un décor, une atmosphère qu'il manque à la traduction des sentiments de Jasmine. Essentiellement car le cinéma de Woody Allen n'est jamais parfait, jamais prétentieux, jamais superficiel. Certains y verront des moments creux, notamment dans la partie comédie où le film apparaît parfois moins productif. 

Le nouveau virage de Woody Allen à 77 ans se négocie au final de façon maligne et originale. L'écart entre ses premiers longs métrage et Blue Jasmine se resserre, en maintenant quelques réserves favorables aux prochains films du cinéaste. Le chef d'oeuvre qu'est Minuit à Paris n'est pas immédiatement reproductible, mais un cinéma davantage cérébral, drôle et noir, si. Woody Allen reffrape un grand coup après l'ahurissant Match Point, et s'impose une nouvelle fois comme un digne héritier des plus grands cinéastes américains du temps de son enfance. 


Jeremy S.

Dwight (Peter Sarsgaard) et Jasmine (Cate Blanchett)

Jasmine (Cate Blanchett) et Hal (Alec Baldwin)



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