mardi 26 février 2013

Elefante Blanco - Pablo Trapero



Réalisé par Pablo Trapero
Ecrit par Pablo Trapero, Santiago Mitre, Alejandro Fadel, Martin Mauregui
Avec : Jérémie Renier, Ricardo Darin, Martina Gusman...
1h45
Sortie : 20 février 2013

7/10

Après El estudiante ou récit d’une jeunesse révoltée de Santiago Mitre, le groupe de 4 scénaristes revient ici, avec à la réalisation cette fois Pablo Trapero. Toujours autant impliqué dans la politique argentine que dans le précédent film, le cinéaste prend des risques en dénonçant l’état désastreux dans laquelle se trouve une couche très pauvre de la population et en torturant aussi la religion catholique, dans un pays très croyant, tout en la respectant.

Synopsis : Le "bidonville de la Vierge" dans la banlieue de Buenos Aires. Julian et Nicolas, deux prêtres et amis de longue date, oeuvrent pour aider la population. Julian se sert de ses relations politiques pour superviser la construction d'un hôpital. Nicolas le rejoint après l'échec d'un projet qu'il menait dans la jungle, où des forces paramilitaires ont assassiné les habitants. Profondément choqué, il trouve un peu de réconfort auprès de Luciana, une jeune assistante sociale, athée et séduisante. Alors que la foi de Nicolas s'ébranle, les tensions et la violence entre les cartels dans le bidonville augmentent. Quand le ministère ordonne l'arrêt des travaux pour l'hôpital, c'est l'étincelle qui met le feu aux poudres.


Dès le début du film, Trapero nous prend aux tripes. Alors que la 1ère scène se déroule dans un hôpital où les mouvements sont fluides, calmes et montrant un homme (qui se trouve être le prêtre Julian) subissant un scanner, la scène qui suit arrive comme une bombe : un autre homme (le prêtre Nicolas), se cachant, est témoin de la destruction d’un village et de la mort de ses habitants. La caméra épaule, nous met au plus proche de lui et nous fait souffrir avec lui.


De manière très elliptique, Trapero nous amène à l’essentiel, on retrouve les deux prêtres ensemble dans une voiture, où Nicolas se trouve dans un piteux état. Au volant, un personnage très important du film, Luciana, une femme qui aide le prêtre dans le bidonville. Soudain, écran noir, le titre Elefante Blanco apparait. A cet endroit là, et ce pendant une 20aine de minutes, le film ennuie. Tout d’abord, l’arrivée lunaire d’une musique Intoxicados – Las cosas que no se tocan, qui bien que très bonne n’a absolument pas sa place ici. Dès lors, le spectateur décroche. Le prêtre Julian montre et explique la situation du bidonville dont il s’occupe.


Malgré cela, les 20 minutes où l’on perd pied permettent de réfléchir au sujet du film. Et Trapero arrive à nous attraper de nouveau. Tout d’abord par l’utilisation d’une caméra là encore mouvante et fluide qui nous met au même niveau que les acteurs et qui nous fait visiter et admirer la laideur de ce lieu corrompu. En plus de nous avoir avec le cadrage, digne des cinéastes coréens (adeptes de cette caméra mouvante et fluide, au steadycam), il s’attaque à des questions très importantes : la politique (comme il était question dans le film de Santiago Mitre) et aussi la religion.



Nicolas (Jérémie Renier), Julian (Ricardo Darin)


Les deux discours sont la grande réussite du film. Trapero montre l’image de la politique dans les populations à la marge de la société. Les interventions musclés de la police sont répétés et bien appuyés, pour montrer la violence avec laquelle l’Etat décide d’agir. Cette violence est néanmoins justifié car dans ce bidonville les pires vices sont présent : trafique illégaux, guerre de gangs impliquant les jeunes adolescents totalement inconscients comme Monito, un adolescent protégé par le prêtre Julian et qui est un personnage très important dans le film. Trapero joue aussi avec la question de la religion. Il pose d’innombrables questions : La foi est-elle assez forte pour accepter la mort ?,  Est-il possible d’allier vie religieuse et relation amoureuse ? Chaque religieux a ses problèmes et Trapero cherche à montrer le dilemme auxquels les prêtres sont confrontés à savoir choisir entre problèmes personnels et problèmes collectifs. Bien que malmenée, Trapero présente aussi des aspects élogieux. Julian et Nicolas, sont très impliqués dans la vie (politique) du bidonville, si bien qu’ils tiennent tête à leur évêque qui leur reproche d’être trop activiste. Les deux individus sont si engagés qu’à la fin du film tous les deux y laisseront des plumes.

Pour finir, il faut aussi rendre hommage aux acteurs, qui jouent tous de façon très précise et juste. A noter la présence assez surprenante de Jérémie Renier, qui joue le prêtre Nicolas. Les deux autres acteurs principaux du film Ricardo Darin (le prêtre Julian) et Martina Gusman (Luciana) sont des acteurs fétiches de Trapero. Les relations nouées entre ces 3 acteurs dans Elefante Blanco est très chaleureuse, avec des relations parfois paternelles et, pour d’autres amoureuses. Cela donne un peu plus de légèreté, de bonheur à un film très difficile.


La dernière image du film est à la fois très puissante et très ouverte. On aperçoit Nicolas, manipulant une croix, l’air songeur. Va-t-il continuer le travail de Julian et laisser de côté sa vie privée où a-t-il totalement perdu la foi ? Chacun se fera sa propre réponse.  



Alexis D.



Nicolas (Jérémie Renier), Luciana (Martina Gusman)



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