samedi 18 mai 2013

Gatsby le Magnifique - Baz Luhrmann



Réalisé par Baz Luhrmann
Écrit par Baz Luhrmann et Craig Pearce
Avec : Leonardo DiCaprio, Tobey Maguire, Carey Mulligan, ...
Film d'ouverture, Hors Compétition - Festival de Cannes 2013
2h22
Sortie : 15 mai 2013

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Bling-bling


Quoi de mieux que le nouveau film de Baz Luhrmann pour ouvrir un festival de Cannes ? Strass et paillettes, luxe et stars sont de mises sur l'écran comme sur le tapis rouge. Cannes le magnifique... Gilles Jacob et Thierry Frémaux ont bien vendu l'ouverture du 66ème festival de Cannes. Mais dans les faits, quand est-il ? Gatsby le Magnifique est l'adaptation du roman éponyme de Francis Scott Fitzgerald, paru en 1925. Adaptation ? Pas si sûr. Réactualisation serait plus juste. Baz Luhrmann prend le parti audacieux de laisser l'intrigue aux années 20 tout en lui donnant une atmosphère résolument moderne. Rap et hip-hop, effets spéciaux et mouvements de caméra vertigineux sont au rendez-vous. Le pari est risqué mais fonctionne. Baz Luhrmann parvient à capter très justement l'atmosphère légère et décomplexée des années 20 où la bourse s'affolait et les mœurs s'affranchissaient. Frôlant parfois l'esthétique d'un clip de rap américain, Baz Luhrmann traduit pour nos yeux contemporains les excès d'une époque par un festival de sons et de lumières.

La principale réussite du film est le traitement de son image. Avec des images d'archives ambiguës, des effets spéciaux donnant une sensation d'étrangeté, Baz Luhrmann associe totalement le sujet de son film à sa représentation effective. L'image épouse le personnage de Gatsby. Outrancière et irréelle, elle s'attache à décrire Jay Gatsby : fascinant et faux comme un mythe. Dans une certaine mesure, Baz Luhrmann reprend Orson Welles. Dans l'esthétique wellesienne, l'image est volontairement artificielle pour mieux dénoncer le monde faux qu'elle représente. La représentation de Gatsby est factice pour mieux montrer la vacuité et la solitude du personnage. Comme si l'abondance pléthorique cachait les failles de Gatsby. Mais contrairement à Orson Welles, Baz Lurhman ne donne pas de dimension politique à son message. Son discours pictural s'arrête au film seul. Le film ne voit pas au-delà de lui-même comme Gatsby face à la lumière verte qu'il essaie d'atteindre.

Nick Carraway (Tobey Maguire) et Jay Gatsby (Leonardo Dicaprio)

Indéniablement, Baz Luhrmann a un vrai sens du spectacle cinématographique. Les fans du réalisateur y trouveront leur compte car Gatsby le Magnifique s'inscrit dans la lignée esthétique de Roméo + Juliette et Moulin Rouge. Le film propose un cinéma épidermique, surtout jouissif. Mais ses séduisantes apparences ne cachent pas la pauvreté de son fond. Le scénario avance sur des béquilles, maladroitement, sans trop savoir où il va. Le climax est bien mal amené. Narrativement parlant, nous n'en sortons pas repus. C'est finalement dans les scènes les plus intimistes que Baz Luhrmann réussit le mieux, à l'image de la drolatique et cocasse scène du thé entre Gatsby, Nick et Daisy. Si il semble parfois toucher quelque chose de juste, le film souffre d'un manque d'émotion sincère et de réelle empathie. Baz Luhrmann peine à donner une dimension humaine à ses personnages (ce qu'avait fait avec brio Clint Eastwood dans J. Edgar, pour reprendre un film récent de Leonardo DiCaprio).

Daisy Buchanan (Carey Mulligan) et Jay Gatsby (Leonardo Dicaprio)

Gatsby le Magnifique construit une esthétique plastique baroque cohérente. Si, visuellement, le film est à couper le souffle, il pâtit de dialectique et de profondeur. Ce n'est pas un raté mais ce n'est surtout pas un triomphe cinématographique. Succès public assuré, Gatsby le Magnifique passera comme un éclair dans le paysage cinématographique mondial : foudroyant mais éphémère. Un film à l'image du festival qu'il ouvre : bling-bling et prestigieux. 

Adrien V. 

Jay Gatsby (Leonardo Dicaprio)

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